À propos de l’exposition de KIM Sang-Lan.
L’art textile, c’est en fin de compte un produit de la vie quotidienne comme la couture ou le tricot. Le rapport des oeuvres textiles avec l’espace de la vie quotidienne, reste le même dans son essence, que ces oeuvres soient d’une forme élémentaire ou qu’elles relèvent d’une forme et d’un d’art plus poussé. Dans notre pays surtout, les travaux textiles sont étroitement liés avec la manière de vie traditionnelle.
Dans les oeuvres de KIM Sang-Lan, son point de départ semble aussi la couture et le tricot traditionnels, c’est-à-dire la broderie conçue d’une façon précise avec des noeuds et des franges. Or, les noeuds et les franges, ce sont des ornements du costume traditionnel comme les petits objets de parure, le sac et la ceinture, lesquels sont des “oeuvres” typiques de nos ancêtres. Et KIM Sang-Lan, en transformant ces ornements en un motif plastique pur, crée diverses variations plastiques.
Le cadre fondamental des variations plastiques de KIM Sang-Lan est avant tout le cercle. En partant de ce cadre, ou bien des formes circulaires de petite taille suivent en parallèle un rythme régulier, ou bien ces formes apparaissent comme une structure étoilée autour d’un cercle centripète. Cette composition est double en ce sens qu’elle comprend en même temps des éléments de contraction et des éléments d’ expansion. C’est ainsi qu’elle a comme propriété plastique l’unité dans la diversité.
Il me semble que Kim Sang-Lan n’a pas oublié le charme de la broderie coréenne traditionnelle pendant son séjour à Paris où elle est restée longtemps, jusqu’à ce que finalement elle revienne à Séoul, en 1988, l’année des Jeux Olympiques.
En faisant là-bas des travaux expérimentaux, elle n’a cessé de tenter la transformation moderne des stores en utilisant le noeud comme motif. Et ses travaux comprennent également le tissage.
Après son retour en Corée, Kim Sang-Lan semble passer de la contrainte technique du tissage à des travaux textiles plus libres.
Et ce passage signifie la greffe de l’Art textile sur l’Art plastique moderne. Pourtant, ses matériaux principaux restent toujours le noeud èt la frange et dans un certain sens, ses oeuvres récentes peuvent être considérées comme une Recréation de la Tradition. La correspondance d’un modèle géométrique étoilé répétitif avec la variation des fils colorés, L’arrangement régulier sur un disque du contraste entre un cercle acrilique de petite taille et la masse circulaire des fils de couleur, tout cela montre que des matériaux traditionnels s’interprètent en un language plastique moderne.
J’ai parlé de la transformation chez Kim Sang-Lan des matériaux traditionnels en oeuvres plastiques
modernes; ici encore, son amour de la tradition apapparait.
En particulier, son amour pour la. “danse en groupe” ou pour la “danse des éventails”. A ce propos, elle s’exprime ainsi:
“Pour le cadre fondamental de mes oeuvres, j’ai choisi la forme circulaire, en tenant compte de la technique et des formes spécifiques inhérentes aux images de la “danse en groupe” et de la “danse des éventails” qui m’ont beaucoup influencé. On voit, lors de la “danse des éventails”, des dizaines d’éventails identiques former un cercle de manière rythmique. Lors de la “danse en groupe”, les danseuses prennent des cordes et tournent autour d’un pilier au centre. A la fin, les cordes s’enchevêtrent et se ramassent tout en haut du pilier.
J’essaie de mettre ces images dans la forme circulaire pour faire en sorte que chaque élément se réunisse au centre comme une unité propre et équivalente.”
Un travail comme celui-là exigeant “une logique dure et sans faille”, pour reprendre ses mots, un autre travail d’improvisation, lui, s’impose.
En parallèle avec le travail minutieux qui a pour but de réunir la tradition et l’art plastique moderne, elle réalise des oeuvres textiles à la fois libres et expérimentales dans la toile métallique.
La toile métallique, c’est une masse de toiles qu’on a jeté après usage, et par là-même une sorte de rebut. Bien que rebut, cette toile conserve une structure et constitue un élément en trois dimensions, ouvert vers l’espace extérieur.
Si les travaux à base de noeuds et de franges s’inscrivent dans le plan, les réalisations en toile métallique, auxquelles s’ajoutent des noeuds de fils colorés, ont un aspect de “sculpture douce” (“soft sculpture”). Chacune des ces oeuvres en outre présente le caractère de sculpture transparente; en se réunissant, elles forment un autre type d’oeuvre: une installation dans un espace ouvert.
Kim Sang-Lan nous propose donc à travers cette exposition, deux types d’oeuvres distinctes.
Ces deux types de travail se confrontent au problème que cannait L’Art Moderne, celui de la déconstruction et de l’unité, problème qui ne se limite pas à L’Art Textile.
Ainsi, peut-on considérer cette exposition comme élargissant le domaine de l’Art Textile.
1991. 2
LEE Yil
Critique d’art
Professeur à l’Université Hong-Ik.